Campagne Nationale de sensibilisation sur les barrières de l’entreprenariat féminin liées aux stéréotypes genre

CARE International Maroc, ONG marocaine créée en 2007, appartient au réseau international de CARE qui est l’une des plus grandes organisations internationales d’assistance et de développement au monde. CARE cherche à attaquer les causes profondes de la pauvreté et à habiliter les communautés à se prendre en charge. L’analyse des principaux enjeux de développement au Maroc oriente l’action de CARE autour des problématiques de l’éducation, l’accès à des opportunités économiques et la participation politique et citoyenne des populations les plus vulnérables, notamment les enfants, les femmes et les jeunes.

II.          Contexte et justificatif :

Tel qu’observé dans bon nombre de pays, la pauvreté au Maroc affecte principalement les personnes vivant en zones rurales et encore davantage les femmes. Les femmes prennent part à la vie économique de leur communauté et région, mais restent prisonnières des secteurs offrant des conditions de travail précaires et difficiles, notamment l’agriculture, le travail domestique, le tissage et l’économie informelle en général. Ceci est causé par plusieurs facteurs, tel le retard historique de l’éducation des filles, le caractère discriminatoire des emplois, la division du travail au sein des familles, la restriction des débouchés ainsi que l’assignation des tâches ménagères aux femmes.  En plus, les femmes pratiquant une activité ne bénéficient pas des gains engendrés par cette activité. Pour la plupart, le conjoint ou le tuteur s’approprient les gains générés par l’activité féminine.

L’accès des femmes au monde de l’entrepreneuriat et aux postes de décision économique reste très faible. Seulement 0,6% des femmes actives réussissent à créer leur entreprise. Par conséquent, les femmes marocaines s’engagent davantage dans l’économie sociale et solidaire, ce qui leur permet de contribuer à la vie active par le biais d’activités génératrices de revenu. Ainsi, elles ont recours au secteur informel ou aux petites activités dans les domaines de l’artisanat, du commerce ou des services, dans le contexte des préoccupations familiales pour trouver des compléments de revenus ou pour s’occuper dans l’attente d’obtenir un emploi stable.

Les leçons apprises tout au long de la mise en œuvre d’autres initiatives indiquent que les femmes sont intéressées à créer des entreprises ou à renforcer leurs entreprises ou leurs coopératives existantes, mais elles rencontrent des difficultés lors de la création de leur entreprise notamment, le manque d’accès au financement, le manque de capacités techniques et commerciales, le manque de soutien des secteurs privé et publique, le manque de compétences et de connaissances axées sur le marché et le manque de confiance, en plus d’autres obstacles sociaux.

Malgré qu’ils existent différentes initiatives étatiques et du secteur privé pour l’autonomisation des femmes, les résultats restent très faibles en raison notamment du manque de formation, coaching et mentorat.

La tendance dominante consiste à croire que la situation familiale n’a aucune incidence sur le travail et qu’elle est neutre pour la carrière tant des femmes que des hommes. La référence à la famille dans les représentations et dans les pratiques établit ainsi de manière spécifique le statut des femmes. Alors que les carrières masculines sont traditionnellement corrélées positivement avec le fait d’être marié et d’avoir des enfants, celles des femmes le sont négativement. À l’opposé, les femmes mariées n’ont d’autres choix que de négocier avec la sphère du travail et la sphère familiale. En cas de conflit, elles auront tendance à accorder la priorité à la famille.

Cette tendance trouve ses origines dans des stéréotypes et des perceptions sexistes et genrés des rôles très ancrés dans la société marocaine et sont renforcés sous différentes formes de socialisation. Les gardiens de la tradition au niveau local renforcent les stéréotypes genre, surtout le principe qui soutient que la femme doit être soumise à son mari. Dans ce sens, la forte division du travail basée sur ces stéréotypes est dictée par la communauté. Les femmes, surtout des milieux défavorisés, éprouvent beaucoup de difficultés à faire face à ces stéréotypes pour avancer dans leur carrière d’entrepreneuriat ou autre. Le premier et plus grand défi reste la féminisation de certains rôles comme les tâches ménagères, les soins des enfants et toutes les obligations familiales qui entrent dans le cadre de l’espace privé. Les femmes ont ainsi plus de responsabilités et doivent faire face à plus d’enjeux. Par conséquent, le « temps des femmes » apparaît comme un obstacle pour expliquer les difficultés qu’elles rencontrent dans la vie professionnelle et surtout quand il s’agit d’entrepreneuriat. Dans les milieux professionnel et social, elles sont constamment tiraillées entre deux identités qui entrent en concurrence : celle de mères (reproductives) et celle de femmes actives (productives).

De plus, la mobilité des femmes est généralement dictée par les exigences familiales et l’impact du temps passé à l’extérieur du ménage sur celui alloué à la famille, à l’éducation des enfants et à la proximité du foyer. Les difficultés liées aux stéréotypes que rencontrent les femmes pour concilier vies personnelle et professionnelle est l’un des grands obstacles à l’avancement des femmes dans la sphère économique ou autres. Certaines femmes réussissent à un certain niveau à sortir des rôles imposés par la société et mettent sur pieds leurs propres entreprenariats. Cependant, le plus souvent elles ne les contrôlent pas ; elles ne détiennent pas le pouvoir de décisions. Ce sont très souvent des membres masculins de la famille (ex. le père, le mari) qui le détiennent ; sur la façon dont les ressources sont gérées, sur le choix des fournisseurs et des marchés et même sur la mobilité des femmes pour opérer leurs entreprises.

Les stéréotypes de genre perpétués au sein de la société marocaine (et de manière beaucoup plus marquée en régions rurales) sont :

1)           Le rôle de la femme est de prendre soin de son foyer et ses enfants ;

2)           L’homme qui participe aux tâches ménagères est faible et contrôlé par sa femme ;

3)           La femme ne doit sortir de chez elle que deux fois dans sa vie, pour aller : chez son mari et au     cimetière ;

4)           Une bonne femme écoute et fait ce que le père ou le mari ordonne de faire ;

5)           Une bonne femme baisse ses yeux en parlant aux hommes ;

6)           Une bonne femme doit supporter son mari même si elle est maltraitée par celui-ci.

7)        Les femmes ne doivent pas avoir le dernier mot sur les affaires de la famille

8)        Les femmes ne doivent pas contrôler la finance de la famille

9)    Les femmes doivent d’abord s’occupées des activités de reproduction avant les activités génératrices de revenus (malgré leur besoin d’argent).

   III.          Description du projet :

Le projet « Autonomisation des femmes à travers l’entreprenariat durable » (AFED) est un projet de cinq ans mis en œuvre par CARE International Maroc dans la région de Marrakech-Safi au Maroc, en collaboration avec CARE Canada, entre le 14 mai 2018 et le 30 avril 2023. Il est financé par le Gouvernement canadien (à travers Affaires Mondiales Canada – AMC). Le Résultat Ultime du projet est L’autonomisation économique des femmes rurales de la région Marrakech-Safi est augmentée. Pour ce faire, CARE Maroc vise le renforcement de 40 coopératives féminines et l’accompagnement de 1 296 femmes pour la création de leurs entreprises. Plus spécifiquement, le projet cherche à lutter contre les stéréotypes genre qui entravent la participation économique des femmes et à renforcer l’entreprenariat féminin pour plus d’autonomie et prise de pouvoir. Ainsi, AFED est conçu afin d’avoir un impact sur les communautés elles-mêmes, en engageant particulièrement les individus influents qui tendent à perpétuer les stéréotypes de genre (hommes, religieux, leaders traditionnels, femmes – par exemple les belles-mères -, etc.), au fur et à mesure que les groupes de femmes ciblées auront renforcé leurs capacités techniques en entreprenariat.

 

   IV.          Objectif de la campagne

  1. Sensibilisation :
  • sensibiliser la société marocaine au niveau régional et national et les communautés cibles de CARE Maroc sur les barrières de l’entreprenariat féminin liées aux stéréotypes du genre et comment appuyer les femmes au niveau communautaire surtout à travers une gestion équitable des ménages
  • sensibiliser les acteurs étatiques qui travaillent sur le renforcement de l’entreprenariat à prendre en considération les besoins spécifiques des femmes dans leurs services.