L’Association démocratique des Femmes du Maroc (ADFM) a pris connaissance, avec consternation, des résultats de l’enquête de la « Prévalence de la violence subie par les hommes dans les différents espaces de vie » – menée auprès d’un échantillon de 3000 hommes et publiés tout récemment par le Haut-commissariat au Plan- et attire l’attention sur les points suivants :
· Bien que le HCP énonce que le but de cette publication « n’étant, certainement pas de minimiser les violences endurées par les femmes, mais plutôt d’apporter plus d’éclairage au phénomène social de la violence dans son aspect bidimensionnel, et d’élargir son appréhension du côté des victimes et des auteurs dans leur double source féminine et masculine », nous pensons à forte raison que ces résultats qui font du Maroc une exception mondiale où la « prévalence de la violence subie par les hommes » est semblable voire dépasse même celle faites aux femmes!
· Le recours par le HCP à des concepts, typologies et formes inscrites universellement dans le champ d’étude du phénomène de violence faites aux femmes pour mesurer ce qui est appelé « la violence subie par les hommes » est irrecevable au plan scientifique et méthodologique au vu du consensus mondial reconnaissant la violence envers les femmes comme une violation des droits de l’Homme, une discrimination pour motif de sexe et une atteinte à leur liberté et dignité. De ce point de vue, il est inconcevable d’appréhender les violences fondées sur le genre au même titre et de la même manière que toutes les autres violences.
· Ces biais conceptuels et méthodologiques induits par la non appréhension des violences, telles qu’universellement reconnues, ont pour conséquence d’ériger de simples conflits/désaccords conjugaux, en actes de violence à l’encontre des hommes comme à titre d’exemple, « le refus de la partenaire de parler à son conjoint pendant plusieurs jours” ; ou les manifestations de colère ou de jalousie de la part de la femme lorsque “son partenaire parle à une autre femme” » ou encore, le fait “d’insister de manière exagérée pour savoir où le mari se trouve “…) .
· Enfin, le HCP est fortement interpellé pour revoir la définition des violences, notamment celles considérées par les hommes comme par les femmes comme étant des « violences psychologiques ». Il en va de la crédibilité et de la notoriété de l’institution statistique nationale et de ses productions actuelles et futures.
Au regard des éléments précédents, l’ADFM appelle :
ü Le HCP à apporter les éléments expliquant les raisons ayant présidé à une telle étude et à compléter ces résultats par les analyses nécessaires à leur compréhension en faisant une comparaison conceptuelle entre ce que veut dire le terme violence et sa perception par les deux sexes ;
ü Les médias et journalistes à traiter les résultats qui ressortent de cette étude avec beaucoup de prudence et d’exigence méthodique et scientifique afin de ne pas contribuer à davantage de banalisation du phénomène de la violence faite aux femmes et à intensifier et inscrire dans la durée les programmes de sensibilisation à la lutte contre la violence ;
ü Les responsables et décideurs à apporter les réponses nécessaires à la lutte contre la violence faite aux femmes à travers une refonte de la loi 103-13 permettant une réelle protection, prévention des victimes et leur prise en charge effective.
Association démocratique des Femmes du Maroc
le 13 avril 2021